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07/02/2013

La valeur des vignes haut-marnaises

Les archives des notaires permettent de connaître le prix atteint par les vignes vendues à la fin de l'Ancien Régime et ces prix peuvent être comparés à ceux pratiqués dans le reste de la France.

Arthur Young

L'agronome anglais Arthur Young au cours de ses voyages en France (1787-1790) a rassemblé de nombreuses  notes (c'est lui qui l'écrit) sur ces prix de vignes, à travers le pays. Il a écarté les prix trop élevés et calculé une moyenne : 871 livres /arpent de Paris (qui fait 34,19 ares). On peut facilement le traduire en livres/ha : 2548 livres. (la livre est la monnaie nationale juste avant 1789 ; elle vaut pratiquement autant que le franc germinal qui a été créé quelques années plus tard ; on peut donc dire (et lire) 1 livre = 1 franc)

Source : Arthur Young, Voyages en France, 10/18, 1970 (Ce sont des extraits, l'oeuvre complète a été publiée vers 1932, traduite par Henri See).

Emile Levasseur

Un professeur au collège de France, Emile Levasseur, en 1893, a compilé toutes les données chiffrées qu'il a trouvées dans un livre consacré aux prix et au revenus en France depuis le Moyen-Age. Pour la période 1775/1790 et pour les vignes, il donne la valeur de 1312 livres/ha. Ce chiffre est probablement plus représentatif que celui donné par Young, car calculé un siècle après, il pouvait rassembler de très nombreuses observations, prises un peu partout.

Les archives de la Haute-Marne

Un premier comptage en Haute-Marne chez un notaire de Chaumont, entre 1785 et 1791 (AD H-M, 4E12/61-62) nous renseigne sur 33 "journées" de vigne en transaction. Dix transactions utilisables (précises) portant sur 177 ares de vigne échangés donnent un  prix de la vigne à l'hectare de 989 livres. Il s'agit de vignes très diverses : deux sont partiellement en friche et ne valent pratiquement rien (87 livres/ha), les deux plus chères valent 10 fois plus (1752 livres/ha). Cet écart est courant dans les vignes et on le retrouve partout. Partout il y a des vignes qui ne valent plus rien et d'autres en pleine production et bien entretenues...

Un échantillon bien plus vaste (78 transactions portant sur 311 journées de vigne prises sur 27 finages villageois) fournit un prix à l'hectare un peu plus faible encore mais plus représentatif) : 806 £/ha.

 Finalement sur 320 transactions, situés dans les trois parties du département, à peu près également, on se rapproche beaucoup des chiffres trouvés par Levasseur :

Valeur des vignes haut-marnaises, en 1788-1790

Prix

Nombre d'ouvréees

ares

£/journée

£/ha

68281

1349 5666

50,6

1205

Ce résultat (1205 £/ha) montre la grande représentativité du vignoble haut-marnais, par rapport au reste du pays, où les vignes paysannes jouent comme en Haute-Marne un rôle majeur sans être exclusif. Dans notre échantillon haut-marnais, il y a d'ailleurs un certain nombre de parcelles de vignobles seigneuriaux vendues très cher (trois ou quatre fois plus cher).

Un exemple seigneurial

Ainsi, le seigneur de Curel (François de Hennequin) qui est parti à cette époque s'établir à Nancy a revendu toutes ses vignes en 1789, 1790 et 1792. Cela a représenté 1,75 ha de vignes en 15 parcelles revendues au prix moyen exorbitant de 6200 livres/ha. En fait les ventes de tous ses biens locaux se sont échelonnées entre 1788 et 1795.

Ventes du seigneur de Curel

En Valeur des ventes Valeur des vignes
1788 446,25  
1789 14686,5 10085
1790 16426,75 2888,25
1792 5034 1139
1795 224685  

 Mais, malgré ce que l'on sait de l'énorme inflation qui touche la période 1790/95, la valeur des vignes a été décroissante avec le temps. Les ventes de 1789 se sont réalisées à 30 livres/corde ; celles de 1790 à 23,6 livres/corde et celle, unique, de 1792 à 17 livres/corde, soit que les circonstances politiques, soit que la nature des parcelles le justifient... Rappelons que la corde fait 0,42 ca. Les prix de vente des vignes sont donc très élevés, compris entre 4000 et 7150 livres/ha, selon les parcelles.

Ce sujet de la valeur des vignes est évidemment abordé (sur la période 1700-1890) dans Les métamorphoses du vignoble sur le territoire haut-marnais :

http://vigne-haute-marne.monsite-orange.fr

 PS : Sur la valeur des vignes proprement dite, on peut dire que la variation de valeur est surtout corrélée au niveau d'entretien de la vigne, sachant qu'elles sont pratiquement toutes situées en positions favorables (pentes bien exposées, à l'exception de certaines vignes des monastères ou des grandes fermes destinées à produire une honnête piquette pour les valets de ferme ; c'était leur boisson habituelle il en fallait donc plutôt à 6-8° que plus...). Donc pour aujourd'hui, il faut chercher tous les emplacements de vieilles vignes du département et on peut admettre qu'ils ont une valeur équivalente (évidemment les meilleurs terrains sont toujours à mis pente - pas en bas et pas trop hauts.

 

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